Entretien avec Cédric Van Styvendael, le maire de Villeurbanne, qui soutient Olivier Faure, le premier secrétaire sortant. La place du PS à l’intérieur de la NUPES, est l’un des points de clivage sur la stratégie à adopter que vont trancher les militants de ce parti pour désigner leur premier secrétaire. Plus de 40 000 participants devraient voter du 12 au 19 janvier 2023. Hélène Geoffroy, maire PS de Vaulx-en-Velin, n’est plus la seule à vouloir succéder à Olivier Faure pour lui succéder. Nicolas Mayer-Rossignol, le maire Rouen est également sur les rangs.
L’ambiance au PS a-t-elle évolué depuis le congrès qui s’était déroulé à Villeurbanne l’an dernier ?
Cédric Van Styvendael : Les débats me paraissent encore très autocentrés sur le parti chez un certain nombre d’adversaires d’Olivier Faure alors qu’on devrait plutôt articuler ce congrès autour des thématiques qui préoccupent les Français : le pouvoir d’achat, l’énergie, la santé, la mixité sociale… Depuis la Présidentielle de 2022, ils passent leur temps à savoir si on est soumis à Mélenchon ou pas, après avoir cherché si on était soumis aux Verts au moment des élections régionales de 2021… Même au PS, on est lassé de ces échanges qui me désolent un peu à un moment où le Rassemblement national n’a jamais été aussi fort et organisé, au point d’être aux portes du pouvoir.
Votre indépendance vis-à-vis de. LFI, c’est quand même un sujet d’actualité !
Il faut arrêter sur ce sujet. J’en ai marre qu’on agite des faux problèmes. Le PS a démontré qu’il savait toujours se faire entendre. Prenons le projet de loi sur la réintégration des personnels soignants : le RN voulait piéger LFI en s’associant avec lui. On a fait clairement comprendre que ce n’était pas envisageable à LFI qui a donc retiré son projet de loi. Boris Vallaud, président du groupe PS-NUPES à l’Assemblée nationale, fait un super travail. Le PS ne s’est pas vassalisé.
Les vrais enjeux pour vous ?
Les objectifs et la méthode pour reconstruire une force de gauche et écologiste. J’ai participé à cette réflexion en signant une contribution avec des maires et présidents PS de Départements autour de quelques points de repère : une Europe sociale, la mixité scolaire, l’accès à la formation tout au long de la vie pour répondre aux nouvelles qualifications recherchées et trouver un emploi… Le PS doit se reconnecter aux préoccupations de notre électorat populaire. Le deuxième enjeu c’est quelles forces de gauche faut-il rassembler pour les prochaines élections ? Mais avant de définir le périmètre de cette union, abordons ces sujets. Moi-même, je peux afficher mes désaccords avec LFI sur l’Europe sans pour autant les ostraciser pour une nouvelle union.
À une époque, on parlait des éléphants du PS et des affrontements entre les fameux “courants”… Aujourd’hui, faute d’avoir exercé le pouvoir national depuis 2017, il n’y a plus que des éléphanteaux et des rivalités de personnes ?
Certains surjouent effectivement des fractures qui n’existent pas et cela pour des intérêts personnels. Cela aussi me désole. Quand je discute avec les militants PS de Villeurbanne, ils sont désemparés de voir ces questions de personnes prendre le pas sur les idées. S’il y a encore des éléphants au PS, leur manière de faire de la politique est déconnectée du réel. Je peux aussi me mettre dedans ! Je ne prétends pas avoir tout compris. Mais je sais qu’on ne va pas gagner la présidentielle de cette manière. On n’est plus assez nombreux au PS pour se diviser entre courants.
Vous avez répété plusieurs fois être “désolé” dans cet entretien… Vos raisons d’espérer ?
Ce qui me rend optimiste c’est que le rassemblement de la NUPES pour les législatives de 2022 a été un premier accord intéressant. Il n’est pas parfait et il faut clarifier certains points entre nous, notamment sur la politique internationale, mais cet accord trace un chemin avec un socle commun.
On reproche à certains PS de vouloir revenir à une forme de radicalité…
Si être radical, c’est revenir aux racines de la gauche car étymologiquement, c’est la signification de radical, cela ne me fait pas peur que le PS soit vu comme radical. En revanche, je ne veux pas être dans l’outrance verbale. Ceci dit, il ne faut pas faire semblant de croire que le PS a toujours été parfaitement lisse au cours de son histoire. Et ces différences sur la forme que j’ai avec certains socialistes, ne veulent pas dire qu’on a des divergences de fond.
Mais vous considérez encore qu’Olivier Faure a fait le job en tant que premier secrétaire car pendant son mandat, le PS a enregistré avec Anne Hidalgo, la défaite la plus cuisante de son histoire à l’élection présidentielle…
Oui, Olivier a fait plus que le job, c’est pour cela que je vais être son mandataire dans le Rhône pour cette élection. J’aurais aimé en trouver d’autres des Olivier quand le PS était si bas que les journalistes ne nous adressaient même plus la parole ! Ceux qui nous donnent des leçons aujourd’hui en affirmant qu’on n’a rien foutu, ils étaient où à ce moment-là ? En 2020, des camarades ont gagné des Villes, des Départements ou conservé des Régions. Olivier a ses défauts et ses qualités mais on ne peut pas lui faire de procès sur sa loyauté et sa capacité à tenir dans ces moments difficiles.
Un nouveau Jospin qui doit “fendre l’armure ”?
Il a déjà fendu son armure ! Cette année 2022 a révélé sa personnalité. Quand il s’est défendu de certaines attaques, il s’est même dit “libéré”. J’apprécie cet Olivier libéré-délivré même s’il n’était pas vraiment emprisonné ni au PS ni à la NUPES. Depuis les élections législatives, ses propos ont toujours été d’une grande clarté. Il a posé clairement nos valeurs à chaque fois que c’était nécessaire. Encore une fois, je salue le travail de Boris Vallaud mais aussi du député Philippe Brun à l’Assemblée. Cette équipe me donne du baume au coeur. Elle est costaude et renouvelée.
Au fond quel type de gauche vous défendez avec Olivier Faure ?
La social-écologie. François Ruffin a récemment réutilisé l’expression de social- démocratie. Pourquoi pas, mais ce concept historique ne parle plus qu’aux experts. Aujourd’hui, inégalités et écologie sociale sont intimement liées. Il faut aussi renouveler nos méthodes de travail avec les Français. Le PS doit être plus ouvert vis-à-vis de ses sympathisants s’il veut compter d’ici la prochaine Présidentielle. Le PS doit aussi dire clairement que seul il ne peut rien. La gauche n’a jamais gagné sans réussir son union. Aujourd’hui, l’appétence des militants des différents partis de gauche pour une proposition commune est même plus forte qu’à l’époque où François Mitterrand a lancé le programme commun en 1972. Et s’unir ce n’est pas se dissoudre.
Entretien publié dans Mag2Lyon N°151 – décembre 2022
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