Redonner du pouvoir d’achat avec le solaire 

La société lyonnaise Terre et Lac accompagne des collectivités locales décidées à reprendre la main sur le coût de l’électricité. Sa solution: leur livrer des centrales solaires de proximité qu’elles peuvent gérer comme une boucle locale d’énergie. Après une première à Faverges-Seythenex en Haute-Savoie, elle prévoit une installation vingt fois plus importante à Belleville-en-Beaujolais. Les explications de son fondateur et dirigeant Pierre-Emmanuel Martin. Propos recueillis par Lionel Favrot 

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Qu’est-ce qui incite les collectivités locales à devenir désormais productrices d’énergies renouvelables?
Pierre-Emmanuel Martin : Le solaire est devenu une énergie financièrement compétitive et les élus savent qu’elle est disponible sur tout le territoire français de manière assez bien répartie. Par ail- leurs, ils se demandent comment agir face au réchauffement climatique. Enfin, l’actuelle hausse des prix de l’électricité pose des problèmes de pouvoir d’achat. 

En quoi une centrale solaire est-elle une réponse à ces problématiques ?
C’est une installation relativement simple quand on s’adresse à des entreprises qui maîtrisent cette technologie. On intervient là en tiers de confiance. En étudiant avec eux les terrains les plus adaptés, on peut leur livrer une centrale solaire qui fera partie des actifs de la collectivité locale. 

Comment les élus peuvent-ils reprendre la main sur le prix de l’électricité qui est très encadréen France ?
L’autoconsommation collective est autorisée par la réglementation depuis octobre 2020. À l’échelle d’un territoire, une personnalité morale peut organiser la production dans un périmètre de 2 km en rassemblant des panneaux photovoltaïques installés en un ou plusieurs lieux dans une limite de 3 MW. Cela peut être des champs ou des toitures. À titre dérogatoire, en présence d’habitats dispersés, ce rayon peut être étendu à 20 km. Ce qui permet de créer des boucles locales d’énergie. 

À quoi correspondent ces boucles locales d’énergie ?
On a créé une plateforme sur internet à laquelle peuvent adhérer les habi- tants qui le souhaitent. La commune peut alors assumer son rôle d’auto- rité organisatrice et planificatrice. J’ai créé une société spécifique pour ce service, My Energy Manager, qui peut intervenir avec Terre et Lac mais aussi avec d’autres acteurs du solaire. 

Le solaire permet vraiment de réaliser des économies ?
Oui, de l’ordre de 25 à 30 % par rapport aux prix actuels de l’électricité. 

C’est facile d’installer des centrales solaires ou rencontrez-vous autant d’opposition que les éoliennes ?
Le solaire suscite clairement moins de résistance que les éoliennes mais les énergies renouvelables ont toujours été un sport de combat en France! À un moment donné, il faut dire les choses: l’Europe a imposé les énergies renouvelables mais si la France avait pu s’en passer, elle l’aurait fait. Jean-François Carenco le directeur de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), vient de pousser un coup de gueule contre le retard français en matière d’énergies renouvelables. Mais il y a une dizaine d’années, le Gouvernement a imposé un moratoire sur les installations, stoppant ainsi de nombreux projets, en dénonçant les “spéculateurs du solaire”. Et une fois les autorisations adminis- tratives obtenues, on peut avoir des oppositions locales de riverains qui ne tolèrent pas que des centrales solaires modifient le paysage. 

Comment s’est passé votre projet à Faverges-Seythenex ?
Nos diagnostiqueurs ont identifié un terrain intéressant à savoir une ancienne décharge. Le maire, Marcel Cattaneo, et son équipe, nous ont très bien accueillis car ils avaient eu un projet similaire qui avait été bloqué par ce moratoire. Nous avons commencé les réflexions dans les années 2016-2017 et nous avons pu la mettre en service en juin 2021 avec le nouveau maire, Jacques Dalex. 

Qu’est-ce qui incite les collectivités locales à devenir désormais productrices d’énergies renouvelables?
Pierre-Emmanuel Martin : Le solaire est devenu une énergie financièrement compétitive et les élus savent qu’elle est disponible sur tout le territoire français de manière assez bien répartie. Par ailleurs, ils se demandent comment agir face au réchauffement climatique. Enfin, l’actuelle hausse des prix de l’élec- tricité pose des problèmes de pouvoir d’achat. C’est une centrale de 2,5 MW installée sur 3 ha. Ce qu’on a pu mettre en place à Faverges-Seythenex va nous permettre de déployer des installations plus grandes sur le même principe de boucle locale d’énergie. 

À quel projet réfléchissez-vous actuellement ?
Nous travaillons avec la Communauté de communes Saône-Beaujolais, présidée par Jacky Ménichon, sur une centrale multi-sites à Belleville-en-Beaujolais. C’est un territoire très dynamique. 

Où pourriez-vous installer
des panneaux photovoltaïques à Belleville-en-Beaujolais ?
C’est à l’étude. On a repéré trois à quatre sites adaptés à la pose d’ombrières solaires qui pourraient permettre de produire environ 2MW mais aussi une gravière de 17 ha où on pourrait aller jusqu’à 7 à 10 MW et d’autres terrains, notamment des délaissés urbains pour environ 10 MW. Au total, on pourrait aller jusqu’à 50 MW, une centrale solaire qui serait donc 20 fois plus grande que celle de Faverges-Seythenex. 

L’agrivoltaïsme commence à se développer car il offre un complément de revenus aux agriculteurs mais il suscite aussi des polémiques! 

Le solaire n’a pas d’impact sur la biodiversité. Des études menées par Enerplan, le syndicat de l’énergie solaire renouvelable, montre que la pose de module solaire favorise même la pousse de l’herbe. Son impact sur l’artificialisation des sols est faible puisqu’il se limite à la surface occupée par les pieux supportant les modules et au chemin des câbles, soit 5 % de la surface d’une centrale. Mais c’est vrai qu’on ne peut plus faire passer de gi- gantesques moissoneuses-batteuses. 

Il y a quand même des oppositions chez les agriculteurs. Comment l’expliquer ?
La FNSEA et les chambres d’agricultures ont longtemps été opposées par principe à ces installations. Mais je suis présent à de nombreux salons agricoles et je peux vous assurer que les éleveurs ovins, par exemple, ne sont pas opposés à l’agrivoltaïsme. Et ce ne sont pas les seuls. Terre et Lac a créé avec OXYANE(1), une coopérative solaire pour aider à ces installations. Autour de Lyon, par exemple, des agriculteurs s’interrogent sur l’opportunité d’abandonner le maïs qui leur offre des marges très faibles pour le remplacer par du maraîchage sous des modules photovoltaïques avec des lé- gumeries qui permettraient de fournir les habitants de la métropole en circuit court. Un projet qui nécessiterait un accompagnement. Mais il ne faut pas faire n’importe quoi. On a été les premiers à recruter des architectes paysagistes pour veiller à une bonne insertion de nos projets et cette pratique a fait école. 

(1)Née en janvier 2020 de la fusion des coopératives Terre d’Alliance et Dau- phinoises, Oxyane précise rassembler 165 sites agricoles impliquant 7 000 agriculteurs actifs et 1 929 collaborateurs sur dix départements : Ain, Drôme, Isère, Jura, Loire, Rhône, Métropole de Lyon, Saône-et-Loire, Savoie et Haute-Savoie. 

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