NOMINATION : Direction musique exploratoire


Nadia Ratsimandresy

Nadia Ratsimandresy est parisienne et musicienne. Elle a quitté la Lozère pour entrer en Grame, une vraie pouponnière d’éveil à la création en musique contemporaine située au Pôle Pixel. Rencontre en résonance avec la nouvelle directrice avide d’exploration tombée par hasard dans la musique électronique. Par Agnès Benoist.

Pouvez-vous résumer votre parcours ou comment devient-on directrice du GRAME, Centre national de création musicale, à Lyon ?
Nadia Ratsimandresy : Par hasard. J’ai été emmenée par mes parents à 9 ans dans une école de musique. Ils voulaient que leurs enfants fassent une activité épanouissante, extra-scolaire. Ils pensaient au piano. En milieu d’année, il n’y avait plus de place en piano, alors l’école m’a proposé un autre groupe. Je suis donc entrée dans le monde de Françoise Pellié-Murail à Evry une salle remplie de claviers : la classe de synthétiseur – je n’en connaissais même pas le nom-. A la rentrée, évidemment on m’a proposé une place en piano mais j’étais « en amour » de ma professeure de synthé… elle nous communiquait sa joie, sa fantaisie avec ses instruments, ses sons. Pourquoi changer ? Mes parents m’ont écouté.

Donc vous êtes entrée directement et naturellement dans le monde des musiques électroniques ?
Oui je suis donc entrée en musique comme cela…. Ce n’est que bien plus tard que j’ai compris qu’il y avait une étiquette « musique électronique ». Il y avait les ondes Martenot, à la sonorité si particulière, un orgue, un haut-parleur, une table de mixage. C’est par ce biais là que j’ai appris la musique. Je ne me suis pas dit que c’était de la musique électronique, j’étais dedans. Je l’ai vécu en mode vibratoire. C’est venu remplir un imaginaire et j’ai fait cela jusqu’à mes 17 ans. Finalement, à 13 ans, les sons que j’avais dans ma tête je ne les ai réalisés que vingt ans plus tard.

Et la musique dite classique alors ?
On faisait aussi beaucoup de transcription de musique classique, Bach, Beethoven sur ces claviers. Mais plus j’avançais, plus je me suis spécialisée dans la musique contemporaine, écrite spécifiquement pour cet instrument. J’ai finalement fait le choix de devenir professionnelle et je suis entrée au Conservatoire national supérieur de Paris. J’ai tout de même commencé en parallèle le violon, à 15 ans car j’avais envie de musique classique et de me confronter grâce à cet instrument à un répertoire dédié de plus de cinq cents ans. J’ai joué dans un trio de musique de chambre. Avec le violon, la vibration passe directement de votre corps au bois de l’instrument alors que la musique électronique c’est par le biais d’instruments comme les haut-parleurs.

Pourquoi avez-vous candidaté à la direction du Grame ?
J’ai envie de rendre ce que j’ai reçu. D’être à l’endroit, comme le CND, centre national de la danse, de la personne qui soutient la création, avant que l’œuvre n’atteigne le public. Offrir la possibilité aux artistes de pouvoir s’exprimer, prendre des risques, le temps d’explorer pendant une résidence. Le GRAME est à l’endroit où il nourrit les imaginaires des musiciens, rend la musique vivante. Il les aide à s’émanciper, avec un soutien financier pour cela. Notre budget total s’élève à 1,1 M€. Aujourd’hui, ce que l’on fait, -les gens peuvent dire que c’est bizarre, hors-piste-. Au GRAME ont dit « exploratoire ». On est le chaînon manquant qui permet d’aller vers l’audace. On défend l’intensité de la parole. On n’a pas envie de boucles de musique TIK TOK ! Il ne s’agit pas de créer l’adhésion à tout prix, mais plutôt de l’analyse, du dialogue et ceci dans le vaste territoire de la région Auvergne Rhône-Alpes, avec ses villes, campagne, montagne.

Comment fonctionneront les résidences au GRAME?
A mon arrivée, l’appel à résidence se faisait sur dossier et sélection. On a reçu 167 dossiers pour l’appel à projet pour 7 places avec un format unique de résidence de cinq jours au studio du Pôle Pixel. Depuis mars, je réfléchis au redéploiement. Il n’y aura plus d’appel à projet, et la durée pourra varier selon le projet. Je pose une direction, une vision, c’est elle qui va guider le choix des artistes.

Quelle est votre définition de la musique exploratrice ?
Il ne s’agit pas de qualifier la musique, c’est la démarche qui prime et ce que l’on veut convoquer par exemple une expérience d’écoute différente immersive, dans la forêt, sur des transats… L’important c’est ce qu’on va traverser comme expérience, sans réduire le projet qui peut être autour de la parole, avec de la musique, de la danse… Ne pas s’enfermer dans une case.

Qu’en est-il de la biennale portée par le GRAME ?
Il n’y aura plus de Biennale, nous le transformons en un festival Zone XP pour exploratoire pour être plus régulièrement présent et garder le temps de rencontres professionnelles du secteur. En 2026, la première édition aura lieu du 14 au 18 octobre 2026, puis reprendra sa place printanière chaque année.

Vous arrivez à un moment où les menaces s’accumulent au-dessus de la culture ?
A un moment où tout fragilise la culture, il faut être clair avec les responsabilités et devoirs de chacun. Quand on dirige un lieu, on a un devoir de transparence. Le GRAME est entre le créateur et le diffuseur. Un artiste a cette capacité de lire le monde, il n’est pas isolé. Il présente les choses sous un autre axe avec d’autres enjeux. Et le but final est d’aller vers les autres. La culture est une nourriture essentielle pour faire humanité avec l’autre. Ce n’est pas une option, il faut aujourd’hui le rappeler ….

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