L’abbé Pierre : une icône complexe

L’abbé Pierre – Une Vie de combat, c’est le biopic réalité par Frédéric Tellier avec Benjamin Lavernhe. Il retrace les luttes de ce prêtre lyonnais, fondateur d’Emmaüs, de sa jeunesse à sa mort. À voir à partir du 8 novembre. Par Maud Guillot.

Chacun a une image de l’abbé Pierre, béret sur la tête, canne à la main, invectivant les puissants et défendant les miséreux. Alors qu’on parle aujourd’hui à tort et à travers de personnalité “inspirante”, ce prêtre lyonnais a toute sa vie tenté de lutter contre les injustices. C’est ce combat exemplaire que raconte le réalisateur Frédéric Tellier dans son film L’abbé Pierre Pierre – Une vie de combat. Alors, c’est vrai, le film est un peu long – 2h18- et certains effets de mises en scène qui évoquent la transcendance sont un peu superflus, mais on a apprécié ce long-métrage émouvant qui dépeint un abbé Pierre fragile physiquement, en proie aux doutes. Bref réel et humain, au-delà de l’image médiatique. Benjamin Lavernhe, de la Comédie française, est plutôt convaincant, surtout quand il joue l’abbé Pierre jeune.

Contrairement à l’Hiver 54 sorti en 1989 avec Lambert Wilson, qui était consacré à l’appel de l’abbé Pierre sur les ondes de Radio Luxembourg (la fameuse insurrection de la bonté), Frédéric Tellier a choisi de reprendre de manière chronologique le parcours de ce Lyonnais, fils de bourgeois, né Henri Grouès en 1912. Pour ceux qui connaissent mal sa biographie, ils découvriront que sa vocation inspirée par St François d’Assise a plutôt mal commencé avec près de 7 ans de souffrance dans un monastère des Capucins, l’ordre le plus strict des Franciscains. Henri Grouès ne supporte pas le vœu de silence ni le manque de stimulation intellectuelle: il dépérit. Pour entrer dans les subtilités de ce personnage, le réalisateur a passé beaucoup de temps avec Laurent Desmard, secrétaire particulier de l’abbé pendant 15 ans et président de la Fondation Abbé Pierre. Et ça se sent. Car les détails intimes de sa vie et de sa personnalité sont explorés. Un peu anecdotique mais révélateur de ses contradictions, on comprend aussi que l’abbé a commis “le péché de chair”, et pas qu’une fois. Par ailleurs, une place importante est faite à son ami d’enfance François Garbit, tué pendant la Seconde Guerre mondiale mais surtout à Lucie Coutaz, co-fondatrice d’Emmaüs qui l’a accompagné toute sa vie depuis son engagement dans la Résistance. Après avoir suivi l’abbé Pierre dans le maquis (c’est là qu’il prend ce surnom), on le voit donc devenir député. Puis fonder Emmaüs pour aider les plus démunis dans une France qui se reconstruit, mais pas assez vite. Le manque de logement est alors criant. La suite du film est davantage connue avec l’appel de 1954. La scène où il découvre un bébé mort dans une caravane est déchirante. Mais on comprend aussi que sa surmédiatisation, son omniprésence au sein d’Emmaüs, ainsi que ses prises de position (comme celle sur l’indépendance de l’Algérie) vont lui apporter certaines inimitiés. Assimilé à un doux rêveur, il n’est pas plus considéré comme crédible pour gérer l’afflux d’argent provoqué par son appel. Quand il tombe malade, il est même éjecté de sa propre organisation… Mais fidèle à ses combats, il revient pour défendre les plus faibles partout dans le monde. Il devient ainsi la personnalité préférée des Français. Quand on voit ce film, on comprend aisément pourquoi.

 

 

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