La Fabrikathé a lancé une plantation de théiers et de plantes aromatiques à Pouilly-les-Nonains dans la Loire. Cette entreprise familiale de thés et d’infusions cherche à relocaliser autant que possible la production des matières premières. Rencontre avec Julien David, l’un des cofondateurs, à la boutique lyonnaise La Chari’thé.
Comment êtes-vous tombé dans le thé ?
Julien David : J’ai passé 17 ans à voyager sur tous les continents. Il y a plein de pays où il n’y a pas de vins à déguster mais je me suis aperçu qu’il y a beau- coup de similitudes avec la dégustation du thé. On a commencé à travailler sur ce projet en 2013 avec mon épouse qui est pharmacienne de formation. On s’est lancé en mode start-up dans notre garage. Puis on a été rejoint par un ancien chef d’un restaurant gastronomique et une nutritionniste-diététicienne qui est également ingénieure alimentaire. On a officiellement fondé La Fabrikathé en 2016. On a débuté avec une dizaine de recettes, aujourd’hui on propose presque 500 références dont environ 300/350 assemblages réalisés par nos soins.
Combien de théiers avez-vous plantés dans la Loire ?
850 théiers cette année. Notre objectif, c’est d’atteindre à 1 hectare, c’est-à-dire entre 8 000 et 10 000 théiers dans 5 ans. On a déjà une quarantaine de théiers qui ont 4 ou 5 ans. Mais on les réserve à la reproduction qui se fait à partir des graines des fleurs. 95 % des thés dans le monde sont issus du camellia sinensis. C’est la façon dont on va ensuite oxy- der les feuilles qui fait la différence entre un thé vert, noir, oolong… Il y a aussi eu des acclimatations suivant les zones géographiques, de la Turquie au Japon en passant par la Chine.
Ils peuvent s’adapter à la Loire ?
Ce sont des théiers que l’on est allé chercher au bord du Lac Majeur en Italie. Ils sont originaires des montagnes turques. Ils résistent assez bien aux -12 °C que l’on peut connaître chez nous l’hiver.
Quelle production est-ce que vous pourriez raisonnablement atteindre ?
Avec 1 hectare de théiers, on ne produira jamais plus de 25 kg de thé. À La Fabrikathé, on vend 12 tonnes de thé par an… Alors qu’on est une entreprise familiale. On réservera notre production en petites quantités pour nos boutiques et nos partenaires restaurateurs.
Vous avez déjà goûté le thé de votre parcelle ?
On a essayé de faire du thé blanc avec des bourgeons et des feuilles à peine ou- vertes. Le résultat est bluffant ! C’est très frustrant car les théiers sont tout petits, on ne peut pas prélever beaucoup de feuilles.
Vous voulez proposer un thé très haut de gamme ?
Avoir la prétention de faire un meilleur thé que les Chinois, ce n’est pas possible ! Pendant les 5 prochaines années, on sera dans l’expérimentation agricole, on va essayer de faire grandir des théiers. Les 5 années suivantes, on sera dans l’expérimentation du travail des feuilles de thé. On a un joli programme pour les 10 prochaines années ! C’est un projet de vie.
La Fabrikathé produit également des plantes aromatiques et médicinales ?
Oui ! On a mis en terre 14 000 plantes. Le climat de Roanne ressemble de plus en plus à celui d’Avignon… On peut très bien planter de la lavande, du romarin, de la verveine, de la menthe dans la Loire. Elles nous servent pour nos infusions et notre marque d’épices. On emploie 5 collaborateurs ouvriers agricoles dont 3 CDI à plein temps à l’année. Ils sont associés dans notre SARL agricole. On souhaiterait que 20 % de nos plantes soient issues de notre plantation pour des raisons d’impact carbone et de qualité.
Qu’est-ce que vous garantissez aux clients de la Fabrikathé ?
Nos produits et notre atelier sont certifiés Ecocert, un label de l’agriculture biologique. Comme on assemble nos thés, ça demande une traçabilité depuis chaque producteur. On a même aidé certains de nos producteurs à se faire certifier bio, à Madagascar par exemple.
Quel type d’arômes utilisez-vous dans vos assemblages ?
L’aromatisation n’est pas un gros mot chez nous. On a travaillé avec un ingénieur aromaticien qui avait une petite société familiale à Grasse. Il nous a aidés à racheter sa société en 2019. On n’utilise pas d’arômes de synthèse. Dans un thé industriel, il peut y avoir jusqu’à 10/12 % d’aromatisation. Nous, on va utiliser 0,5 % d’une huile essentielle de bergamote bio. On ajoute de vrais fruits, des épices… Il faut savoir que 70 % de nos recettes ne contiennent pas d’arômes.
Quelle est votre gamme de prix ?
On se situe au même niveau que les industriels haut de gamme. On y arrive en limitant les intermédiaires – un intermédiaire au maximum – et en dépensant très peu d’argent dans le marketing et la communication. Il faut compter entre 6 et 12 euros pour 100 g d’un thé basique assemblé. Il n’y a pas de limites pour les grands crus, ça peut grimper à 40 euros les 50 g. Les infusions sont vendues entre 8 et 14 euros les 100 g.
Même vos emballages sont locaux !
En effet, nous sommes passés à des sachets fabriqués en Isère, avec un revêtement intérieur à base de résineux qui vient de Haute-Loire.
Où peut-on trouver vos produits ?
Dans nos boutiques : 354 route de Roanne à Pouilly-les-Nonains, 15 rue de la Charité à Lyon et sur notre site internet. De plus, 180 revendeurs distribuent notre marque en France et en Europe.
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