Permettre de voyager de nouveau en train de Lyon à Bordeaux, une ligne fermée par la SNCF en 2014 malgré des manifestations à l’époque des usagers et des élus, c’est le défi que veut relever une société coopérative. Petit groupe de douze au départ, ils sont désormais 8 000 sociétaires sans oublier des collectivités locales qui ont permis de boucler une première levée de fonds de 2,5 millions d’euros.
Comment est née cette aventure et comment l’avez-vous rejointe ?
Dominique Guerrée : L’idée a germé au sein d’une association s’occupant d’une ancienne ligne touristique dans la Vallée du Lot. Parmi ce collectif : Nicolas Debaisieux, un néorural, qui a constaté qu’un réseau de rails et de gares était encore présent mais inutilisé sur la ligne Lyon-Bordeaux. C’est un ingénieur des Mines qui a une solide expérience, notamment comme conseiller auprès de la Commission européenne sur le changement climatique. Un meneur de projet de haut niveau. Pour ma part, j’ai une formation d’ingénieur du son et j’ai géré une société coopérative pendant 19 ans à Clermont-Ferrand. J’ai aussi été trésorier de l’Union régionale des Scop Auvergne. Retraité, j’ai participé à la création d’un parc photovoltaïque villageois dans le Lot. Et ce projet m’a tout de suite séduit.
Quelles ont été les premières étapes ?
Créer une association qui portait déjà le nom de RailCoop car on avait vraiment dans l’idée de créer une Scic, une société coopérative d’intérêt collectif. La particularité de ce statut c’est qu’il peut être ouvert aux particuliers et aux collectivités locales. Le 30 novembre 2019, on a donc constitué cette société coopérative. On a alors été remarqué au niveau régional. Et en juin 2020, on a déposé notre dossier auprès de l’autorité régulatrice des transports avec trois projets de ligne : Lyon-Bordeaux,
Avez-vous vraiment le droit de concurrencer la SNCF ?
Oui, de nouveaux opérateurs peuvent faire circuler des trains de voyageurs suite à l’ouverture totale du rail à la concurrence l’an dernier. Avant, c’était déjà le cas pour le fret. Mais notre objectif n’est pas de concurrencer la SNCF. On veut être complémentaire. Si on se connecte aux gares de Lyon-Part-Dieu et de Bordeaux, c’est bien la SNCF qui va nous amener un flux important de voyageurs. Et pour faire circuler nos trains, on va devoir payer une redevance à SNCF Réseaux, ce qui lui permettra d’encore mieux entretenir ses rails.
Quelles garanties faut-il présenter ?
Il y a deux sésames pour devenir un opérateur ferroviaire. Le premier, c’est d’avoir des fonds propres d’1,5 million d’euros. On a donc lancé une souscription. Fin 2020, on avait près de 3 000 sociétaires qui avaient apporté un peu plus de 600 000 €. Le reportage qu’Envoyé Spécial a consacré à RailCoop le 28 janvier 2021 nous a beaucoup aidés. Cela a été la ruée sur notre site internet. Le nombre de sociétaires a doublé, ce qui nous a permis de franchir ce cap décisif. Aujourd’hui, on est même à 8 000 sociétaires avec un capital de 2,5 millions d’euros. On a aussi dû souscrire une assurance pour une garantie de 45 millions d’euros en cas d’accident grave. On l’a trouvée auprès de GrasSavoye et d’un assureur suisse.
Et ce second sésame qui vous manque encore, c’est quoi ?
Le certificat de sécurité ferroviaire. Ce qui est tout à fait normal car nos trains vont transporter des voyageurs en empruntant des voies utilisées par d’autres opérateurs. Un dossier complexe pour lequel il faut fournir 600 documents de toutes tailles ! Pour y parvenir, Nicolas s’est entouré de deux experts dont l’ancien directeur de la sécurité CFL Cargo, la division fret de la Société nationale des chemins de fer du Luxembourg.
D’où viennent vos sociétaires ?
De toute la France mais aussi de l’étranger. Certains souscrivent pour 100 €, d’autres montent à 5 000 € mais la moyenne est à 250 €. (….)
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