“L’écologie peut être un vrai sujet de droite”

PierreOliver

Nouveau président du groupe LR à la Ville de Lyon et soutien de Valérie Pécresse, Pierre Oliver, 29 ans, veut reconstruire la droite lyonnaise après la double polémique qui l’a déstabilisée en fin d’année 2021. Début novembre, Etienne Blanc a été accusé de relativiser la responsabilité de Vichy pendant l’Occupation, et trois semaines plus tard, Françoise Blanc, qui l’avait remplacé par intérim, a été critiquée pour ses déclarations sur les handicapés. Il s’exprime aussi sur les projets de la majorité écologiste, le candidature Zemmour… Propos recueillis par Lionel Favrot

Aviez-vous été averti par Françoise Blanc de ce qu’elle a appelé une “plaisanterie” sur les handicapés ?
Pierre Oliver :
Non. Dans notre groupe, on se répartit les prises de parole en fonction des thèmes et chacun présente la trame globale de son intervention. Une fois au conseil municipal, les élus ont la possibilité d’ajouter quelques phrases supplémentaires. C’est pour cela qu’on dit habituellement pour les discours, et pas seulement en politique, que “seul le prononcé fait foi”.
Si Françoise Blanc vous avait soumis son texte, vous l’auriez dissuadée de le dire?
Très clairement. Il y a des choses qu’on ne doit pas dire dans un tel hémicycle. Je lui ai immédiatement demandé de s’excuser.
Pensez-vous que critiquer cette élue relève du politiquement correct, c’est-à-dire qu’on ne pourrait plus rire de rien comme certains l’affirment?
Non, non… Je pense vraiment que c’est une erreur. Mais je veux aussi souligner la dignité de Françoise Blanc qui, après cet incident, s’est excusée publiquement et a renouvelé ses excuses dans chacune des commissions municipales où elle est présente. Elle a également écrit personnellement à toutes les associations que sa déclaration aurait pu choquer.
L’affaire Etienne Blanc, accusé de relativiser la responsabilité de Vichy sous l’Occupation, a les mêmes origines ?
Ce sont deux initiatives personnelles sans lien entre elles. En tant que sénateur, Etienne Blanc a évidemment sa liberté de positionnement mais la droite républicaine a son histoire et elle a un rôle à jouer. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire. C’est pour cela que j’ai eu un vrai désaccord avec Etienne Blanc. La droite ne peut pas passer son temps à reprocher à la gauche et l’extrême-gauche de réécrire l’Histoire et, en même temps, avoir des représentants de sa famille politique qui le font !
Etienne Blanc aussi a tenu à se justifier en affirmant que Vichy portait bien une certaine responsabilité dans la déportation des juifs…
On aurait aimé une clarification… plus claire de ses propos. Sa déclaration était inappropriée. C’est pour cela qu’on a eu un désaccord. Cette période a été difficile pour notre groupe au conseil municipal. On a pris le temps de prendre du recul pour s’inscrire dans une nouvelle dynamique.
Quand vous voyez Charles Millon qui serait tenté de rejoindre Eric Zemmour et Etienne Blanc sou- tenir Eric Ciotti, vous vous sentez éloigné de leurs positions ?
Cela n’a rien à voir. Eric Ciotti n’est pas d’extrême-droite et il fait partie de notre famille politique. La force de LR doit être de rassembler largement comme l’UMP en était capable. Eric Zemmour s’apparente pour moi à un candidat d’extrême-droite, pas un candidat de la droite républicaine. Je suis profondément agacé par sa position sur la société et les rapports hommes-femmes. Je n’ai pas vu ce type de déclarations chez Eric Ciotti. En plus, Eric Zemmour est toujours dans les constats, les critiques et la provocation. Eric Zemmour, c’est une bulle spéculative. Quand on n’a rien de nouveau, cela ne sert à rien de courir les plateaux télés. Il va lasser. Eric Ciotti, lui, a émis des propositions au cours de la Primaire de LR.
À Lyon, quelle nouvelle organisation avez-vous mise en place pour éviter de nouvelles polémiques?
Ce que je peux annoncer, c’est que pour pallier ces problèmes, on a nommé Romain Billard, comme vice-président du groupe, pour travailler le fond de chaque intervention et plus largement émettre des propositions. Pour moi, une opposition ne doit pas se contenter d’être critique. Ce jeune élu du 6e arrondissement s’est justement distingué par des interventions qui avaient une belle hauteur de vue. Il aime travailler les idées.
Qu’attendez-vous de Romain Billard et de cette nouvelle organisation ?
Construire une droite urbaine. LR ne s’adresse pas assez aux électeurs d’une grande métropole en ce qui concerne l’éducation, la mobilité, l’écologie… Il faut être capable de parler à ceux qui habitent le centre-ville pour émettre des contre-propositions face à l’action des écologistes. C’est aussi dans cette perspective qu’on a nommé une deuxième vice-présidence de groupe, la centriste Laurence Croizier qui a plus d’expérience. On a créé un groupe de travail avec des élus d’autres grandes villes : Geoffroy Boulard, maire du 17e arrondissement à Paris et Marion Ba- reille maire du 13-14e à Marseille.
Même à LR, certains vous accusent d’avoir fait preuve d’opportunisme en profitant de ces polémiques pour prendre la place d’Etienne Blanc car vous auriez souhaité cette présidence du groupe LR depuis le début du mandat…
Je comprends que certains puissent avoir ce sentiment car je n’ai jamais caché ma volonté de jouer un rôle au sein du groupe au cours de ce mandat. Mais je me serais bien passé de vivre cette période difficile !
Vous avez dû écarter Pascal Blache le maire du 6e arrondissement qui était aussi pressenti pour être président de groupe…
Non, il y a eu consensus sur ma candidature. Aujourd’hui, on doit tous se rassembler pour les élections législatives. À Lyon, deux des quatre candidats de la droite sont membres de notre groupe municipal : Béatrice de Montille et Pascal Blache. Mon rôle, c’est de tout faire pour remettre la droite lyonnaise en ordre de marche.
Sous la présidence d’Etienne Blanc, la droite lyonnaise était trop agressive et pas assez dans les propositions ?
Non. D’ailleurs, je n’ai pas pris cette présidence de groupe parce que je contestais la gouvernance d’Etienne Blanc ! Tout un travail a déjà été fait et on nous a entendus sur les questions de sécurité et de finance. Mais je pense qu’on doit désormais aller plus loin. Mais on ne voit pas toujours la différence entre l’opposition LR et l’opposition des proches de Gérard Collomb par exemple. D’ailleurs vous aviez fusionné vos listes aux élections municipales de 2020 pour affronter les écologistes et leurs alliés au second tour… On ne doit pas être uniquement dans la critique. Exemple : beaucoup de Lyonnais souhaitent qu’il y ait moins de voitures et plus de végétalisation en ville. Ce sont des marqueurs. À LR de faire des propositions qui ne sont pas alignées sur celles des écologistes, des macronistes ou de la gauche !
Vous n’êtes plus à l’époque où Dominique Perben affrontant Gérard Collomb aux élections municipales de 2008, affirmait que son projet de chasser les parkings des Berges du Rhone était une “connerie”?
Non. Mais on doit pointer les incohérences des écologistes. Ils veulent arrêter de densifier la ville et en chasser la voiture. Sauf qu’en construisant moins, ils vont contraindre la population à habiter en périphérie. Ce qui nous amènera plus de voitures à l’avenir. Ça va donc à l’encontre de la lutte contre les gaz à effet de serre. On ne comprend pas non plus pourquoi, de manière arbitraire, ils ferment certaines voies ou transforment certaines rues en impasse… On constate déjà une hausse des embouteillages. Nous, on veut réfléchir à une démarche globale avec une cohabitation des différents modes de transport au lieu d’emboliser la ville par des mesures de blocage et d’interdiction. Les écologistes veulent arrêter la croissance économique, pas nous. On gagnera notre crédibilité grâce à ces contre-propositions.
Vous parlez de droite urbaine par opposition à la droite rurale ? Vous visez Laurent Wauquiez, défenseur d’une certaine ruralité, de la chasse, des traditions…
Non, c’est complémentaire. Moi je veux dire aux Lyonnais que je ne suis pas là pour changer leur mode de vie comme veulent le faire les écologistes mais pour améliorer leur quotidien.
Pour vous, la droite lyonnaise va se relever de cette double polémique..
Oui, je dirais même que la France n’a jamais été autant de droite. Il y a une attente de droite. À nous, Les Républicains, d’être au rendez-vous! Ce qui passe justement par un discours qui dépasse les seules questions de la sécurité et des finances, deux thèmes certes structurants de la droite. Je suis convaincu que l’écologie peut être un vrai sujet de droite. Aujourd’hui, EELV ne prend l’écologie que sous le prisme de l’anticapitaliste. Pour la question des mobilités, je vois qu’on a une croissance importante de la population mais peu d’axes en projet. Et je tiens aussi beaucoup au sujet de l’éducation. J’ai suivi Valérie Pécresse parce qu’elle a été la seule à vraiment en parler au cours de ces Primaires LR. Vu les problèmes rencontrés dans certains quar- tiers de Lyon, il y a urgence à s’investir sur ce thème. L’éducation, c’est ce qui nous permet de créer une vraie communauté de vie. 

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“DÉBAT DE FOND” 

“Pendant la Primaire des républicains, j’ai constaté une harmonie de vues entre les différents candidats. Il y avait beaucoup plus de fond qu’en 2017 où il y avait un gros casting avec un ancien président de la République, deux anciens Premiers Ministres… Avec des approches idéologiques très différentes. Ces échanges de fond, c’est ce qu’attendaient nos militants. D’ail- leurs, la participation a été de 80 %. J’ai soutenu cette année Valérie Pécresse car elle abordait justement tous les sujets. Au contraire, Xavier Bertrand était sur la sécurité, l’immigration et le pouvoir d’achat. Je suis allé à son meeting lyonnais et il a évoqué les autres thèmes de manière très générale. Valérie Pécresse est venue deux fois à Lyon et elle a balayé tous les sujets. J’apprécie aussi David Lisnard, le maire de Cannes, quand il parle culture. Michel Barnier était mon deuxième choix car il avait une vraie stature. Même Philippe Juvin qui était un outsider, a été excellent. Je suis allé l’écouter et il faut entendre ses propositions sur la Santé. Valérie Pécresse a l’avantage d’avoir déjà une certaine notoriété et de maîtriser des thèmes très variés.” 

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“Pied-bot ou cul-de-jatte” 

Lors du conseil municipal du 18 novembre, la municipalité écologiste de Lyon a soumis au vote un rapport de la commission communale pour l’accessibilité de la ville de Lyon 2019- 2020. Présidente par intérim du groupe Droite Centre et Indépendants à la ville, la LR Françoise Blanc a choqué par une déclaration étonnante : “Je n’avais pas saisi qu’on allait pouvoir faire pédaler un pied-bot ou un cul-de-jatte”, a-t-elle déclaré, soulignant faire une “plaisanterie”. Face à l’air consterné d’un certain nombre d’élus dont Grégory Doucet, le maire de Lyon, Françoise Blanc a persisté : “ne vous en déplaise, il me convient de l’exprimer”. Émue, Audrey Hénocque, 1re adjointe, elle-même en situation de handicap, a dénoncé des propos “inadmissibles.” Cet échange a suscité de très nombreuses réactions comme celle de Bruno Bernard, Président du Grand Lyon, qui a salué “ la réaction saine et juste” d’Audrey Hénocque. 

Entretien paru dans Mag2Lyon N°140 

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